2e Session, 41e Législature,
Volume 149, Numéro 109
Le lundi 15 décembre 2014
L’honorable Pierre Claude Nolin, Président
Le Forum sur les droits des femmes, la paix et la sécurité
L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, j’ai participé récemment, à Istanbul, à un forum visant à permettre aux femmes de dénoncer l’extrémisme.
Un groupe de participantes a fait une déclaration que j’aimerais vous lire. Elle s’intitule « Le monde à un point tournant : les femmes ont les solutions » :
Nous, 60 représentantes de 13 pays du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et de l’Asie qui, de concert avec nos collègues d’Europe et d’Amérique du Nord, nous sommes réunies en Turquie à l’occasion du troisième Forum annuel sur les droits des femmes, la paix et la sécurité organisé par l’International Civil Society Action Network, n’avons qu’une chose à dire : assez!
Assez de la violence, assez de l’importation d’idéologies extrémistes qui n’ont aucun fondement culturel, religieux ou historique, assez des armes et des bombes qui nous obligent à enterrer nos concitoyens, et même nos enfants, à l’âge où ils devraient aller à l’école et construire leur avenir. Dans nos pays, les gens souffrent à deux pas des guerres et des actes de violence les plus horribles que le monde a connus ces dernières années.
La grande majorité de nos concitoyens sont des gens pacifistes que tiennent en otage une poignée d’extrémistes, de membres de forces d’occupation et de dirigeants autoritaires. Nous, militantes pour la paix, le pluralisme et le respect des droits, sommes la cible de ces forces. D’une part, notre nom se retrouve sur la liste noire de l’EIIS, aussi appelé Daesh, et d’autres milices extrémistes parce que nous osons tout simplement défendre la liberté. D’autre part, nous sommes harcelées, menacées et arrêtées par les forces de l’État et les forces d’occupation parce que nous osons exiger de simples services, qui vont de l’accès à l’eau potable à la bonne gouvernance, en passant par le respect des droits fondamentaux, l’égalité et le leadership.
Les politiques des acteurs internationaux, notamment l’imposition de sanctions, la vente d’armes, la traite des personnes et le commerce de la drogue, contribuent à la souffrance de nos populations. Nos filles sont contraintes à se joindre à des milices ou enlevées, violées et vendues, tandis que les forces extrémistes et régressives bénéficient de ces politiques. […]
Nous avons de graves problèmes à surmonter. Même si nous ne sommes pas à l’origine de ces problèmes, nous sommes forcées d’en assumer les conséquences. Vous pouvez penser que rien de bon n’est possible dans de telles circonstances, mais vous avez tort. Nous [les femmes] sommes fortes, et nous continuons à travailler parce que nous refusons d’abandonner nos valeurs, de même que notre espoir pour l’avenir. Nous mobilisons les jeunes pour contester les idéologies de la haine. Nous rejetons toute interprétation de la religion qui excuse ou encourage la violence, ainsi que l’oppression des femmes. Nous véhiculons un message de paix et de pluralisme, car c’est ce message qui a permis aux habitants de la région de vivre ensemble dans la paix malgré leurs différences.
Nous travaillons avec les femmes pour approfondir leurs connaissances sur les droits universels et les interprétations inclusives de la religion, ainsi que pour renforcer leur voix, respecter leur dignité et leur donner des emplois. Nous travaillons avec les hommes pour lutter contre la culture de la violence qui s’est répandue dans notre région. Nous déployons de grands efforts pour forcer nos gouvernements à respecter les engagements qu’ils ont pris.
Honorables sénateurs, ces femmes ont ensuite dit ceci :
Nous sommes aujourd’hui à la croisée des chemins. La communauté internationale peut poursuivre ses politiques et ses stratégies inefficaces qui entraînent une plus grande radicalisation et fomentent plus d’extrémisme violent, ou elle peut suivre notre exemple. Une chose est certaine : notre image de la région, tout comme notre vision de l’avenir, est fondée sur la paix, la liberté, la dignité, le respect des droits, le pluralisme et la prospérité pour tous.
Honorables sénateurs, je vous demande de tendre la main aux femmes de cette région. Nous pouvons tous travailler ensemble pour amener la paix dans le monde.
Merci.