À compter de cette semaine, les articles porteront sur un nouvel ensemble de droits prévus dans la Charte canadienne des droits et libertés, à savoir les droits démocratiques prévus aux articles 3, 4 et 5! Cette semaine, je survolerai ces droits, lesquels fourniront le contexte pour les articles des prochaines semaines.
Quand le Canada a vu le jour en 1867, le droit de vote n’était pas un droit absolu.
Il en a résulté des pratiques qui faisaient du Canada un pays non démocratique aux premiers jours de la constitution : par exemple, le vote oral était monnaie courante, donnant lieu à de l’intimidation, et les gouvernements refusaient souvent de tenir des élections dans les circonscriptions où ils pouvaient perdre des sièges.
De nombreuses lois ont également été adoptées pour restreindre le vote. À partir de 1885, par exemple, seules les personnes possédant des propriétés de valeur reconnues par les provinces avaient le droit de voter, ce qui laissait pour compte les Canadiens moins bien nantis. Quant aux femmes, ce n’est qu’en 1919 que le droit de vote leur a été accordé parce que, jusque-là, elles n’étaient pas considérées comme des « personnes » par la loi!
Toutefois, ce sont les Canadiens asiatiques qui étaient le plus mis à l’écart. Par exemple, l’Acte du cens électoral de 1885 interdisait explicitement aux Canadiens chinois de prendre part aux élections.
En vertu de lois provinciales, de nombreux Canadiens se voyaient aussi privés du droit de suffrage : en Colombie-Britannique notamment, les Canadiens chinois ne pouvaient voter presque immédiatement après la Confédération! Pendant les 40 années qui ont suivi, l’interdiction de vote s’est étendue aux Canadiens japonais, sud-asiatiques et sikhs.
Pour pallier cette tranche d’histoire douteuse, les articles 3, 4 et 5 de la Charte visent à empêcher l’adoption de toutes autres lois de ce genre :
Aux termes de l’article 3 de la Charte :
- Tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives fédérales ou provinciales.
En d’autres mots, des lois comme celles qui interdisent le suffrage pour des motifs liés au sexe, à la race ou à la situation financière vont à l’encontre de la Constitution. Par ailleurs, l’article 3 accorde à tous les Canadiens le droit de se présenter aux élections législatives fédérales ou provinciales.
L’article 4 de la Charte est libellé comme suit :
- (1) Le mandat maximal de la Chambre des communes et des assemblées législatives est de cinq ans à compter de la date fixée pour le retour des brefs relatifs aux élections générales correspondantes.
(2) Le mandat de la Chambre des communes ou celui d’une assemblée législative peut être prolongé respectivement par le Parlement ou par la législature en question au-delà de cinq ans en cas de guerre, d’invasion ou d’insurrection, réelles ou appréhendées, pourvu que cette prolongation ne fasse pas l’objet d’une opposition exprimée par les voix de plus du tiers des députés de la Chambre des communes ou de l’assemblée législative.
Autrement dit, des élections fédérales doivent avoir lieu de temps à autre, sinon des gouvernements pourraient refuser d’en tenir dans les circonscriptions qu’ils croient pouvoir perdre. En l’absence d’une guerre ou d’une rébellion, le Canada et ses provinces doivent tenir des élections au moins tous les cinq ans.
Enfin, l’article 5 dispose de ce qui suit :
- Le Parlement et les législatures tiennent une séance au moins une fois tous les douze mois.
Cet article a été adopté en raison d’un seul principe : le Parlement et les législatures doivent rendre des comptes à l’opposition et à la population, par l’entremise des débats et de la période des questions.
Les droits démocratiques énoncés aux articles 3, 4 et 5 de la Charte sous-tendent une même logique : l’interdiction de pratiques préjudiciables qui faisaient du Canada un pays non démocratique. Sans eux, de nombreux groupes parmi les plus vulnérables au Canada n’auraient toujours pas le droit de vote!
Au cours des semaines à venir, ne manquez le prochain article dans lequel j’expliquerai plus en détail comment les mesures d’exclusion électorale au Canada ont influé sur l’évolution de ces dispositions de la Charte.