(Blog invité par un membre de mon équipe @MadisonPG7)

Madison at the anti-Racism march in Ottawa on June 5, 2020. Photo Credit: Naureen Ahmed

Aujourd’hui, pour la première fois, j’ai ressenti pleinement les privilèges dont je jouis en tant que femme blanche au Canada.

C’est donc avec prudence que j’écris sur ce que j’ai vécu lors de la manifestation. Je suis une jeune femme blanche qui a participé à une manifestation organisée par les gens de race noire à Ottawa et qui se déroulait pour eux. Selon moi, il m’incombait de me présenter et d’écouter.

J’ai senti la colère se transformer en pouvoir quand les orateurs ont demandé à leurs compatriotes canadiens, de toutes races, de faire front commun. Je ne pourrai jamais comprendre réellement cette lutte profondément personnelle, mais, tout de même, je souhaite m’engager à lutter avec eux. Je vais prendre position contre les membres de ma propre communauté de Blancs privilégiés qui abusent de leur situation ou qui ne l’utilisent pas de manière appropriée. C’est notre combat.

Bien que je sois en mesure de réfléchir à la signification et à l’importance du rassemblement historique qui a eu lieu aujourd’hui dans notre capitale nationale, je dois également reconnaître que cette manifestation ne se déroulait pas à mon intention. Je suis une alliée et c’est tout. Ce n’est pas à moi de défendre la cause d’autrui. Je ne vais pas me taire, mais je ne vais pas non plus parler si fort au point d’étouffer les voix de ceux qui, enfin, se font entendre.

En tant que Blancs, nous avons construit et maintenu un système d’oppression qui prive directement les gens de couleur de leurs droits, les marginalise et, ce qui est encore plus honteux, les déshumanise, simplement parce que nous les percevons comme étant différents. Nous laissons une interprétation de la structure sociale de la race dicter nos pensées et nos gestes depuis beaucoup trop longtemps. Le coût de cette ignorance est incommensurable.

Les attitudes racistes et anti-noires ne sont le produit d’aucun comportement humain biologique et naturel; il s’agit là d’un déni inexcusable et inacceptable de la vérité. Ces attitudes, on les apprend et on les enseigne. De même, on peut les désapprendre. Les personnes qui ont été mal informées peuvent être éduquées de manière adéquate et pertinente par l’intermédiaire de leurs écoles, de leurs gouvernements et, surtout, de leurs propres collectivités.

À bien des égards, le 5 juin était une journée historique. Nous avons été témoins du pouvoir dont dispose le peuple; maintenant, les gens au pouvoir doivent répondre. Et même s’ils ne répondaient pas, rien n’empêchera les changements systémiques et sociaux immenses qui s’annoncent. Au contraire, une fois de plus, cela fera de nous les ennemis des progrès inévitables, des gens qui ont manifestement tort. Notre travail consiste désormais à écouter et à apprendre, non pas auprès de ceux que nous considérons arbitrairement comme des experts en raison de leurs compétences professionnelles et universitaires, mais auprès de ceux qui habitent nos collectivités. Nos voisins, nos amis, nos familles, nos acteurs et militants locaux, et les relations que nous entretenons avec le reste du monde.

Ce sont ces relations qui vont rebâtir nos collectivités. Ce sont les conversations entre tous ces gens qui favoriseront un véritable apprentissage et, si nous gardons espoir, qui déboucheront sur une conception holistique de la réconciliation. Mais encore une fois, ce n’est pas nous qui dirigeons ces changements et, si les autres ne sont pas disposés à partager avec nous, il faut respecter leur décision. Nous n’avons pas le droit de nous approprier la voix des autres. Nous resterons le symptôme d’un problème vicieux si nous croyons cela et si nous agissons ainsi. Ce que nous devons faire, c’est lire, regarder, écouter et nous engager. Nous devons aussi mettre au défi nos amis, les membres de notre famille et nos voisins qui ne comprennent peut-être pas le besoin désespéré d’un changement spectaculaire de paradigme de faire de même. Cela peut sembler extrême. Tant mieux.

Un autre élément essentiel de ce processus est que nous devons mettre au centre l’inclusion des voix, des idées et des stratégies des Noirs qui soutiendront la restructuration et la reconstruction des systèmes qui ont longtemps été les facilitateurs de leur oppression systémique. En même temps, nous devons donner l’exemple en adoptant des attitudes et des idées antiracistes. Une grande partie de ce que nous devons faire consiste à renoncer à nos positions et à nos ressources de pouvoir et de contrôle. La récente décision très médiatisée du cofondateur de Reddit, Alexis Ohanian senior, qui a renoncé à son siège au conseil d’administration de Reddit et exhorté les autres membres à pourvoir son poste maintenant vacant en nommant un professionnel noir, en est un bon exemple.

L’histoire se souviendra à jamais de ce que nous avons fait et de ce que nous n’avons pas fait, et nous serons jugés à juste titre pour cela. Aujourd’hui commence un nouvel ordre, dans lequel l’égalité raciale n’est peut-être pas encore réalisée, mais la lutte pour l’obtenir est sur la bonne voie et nous la gagnerons. Toutefois, cela ne pourra se produire que si nous permettons aux voix les plus pertinentes et aux récits des personnes mêmes qui sont racialisées d’être entendus. C’est pourquoi, en tant que femme blanche jouissant d’un niveau de privilège inimaginable, je me dis à moi-même et je le dis à mes compatriotes blancs, nos voix se font entendre depuis assez longtemps. Le temps est venu de nous mettre en retrait.