Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 40e Législature,
Volume 146, Numéro 45

Le jeudi 11 juin 2009
L’honorable Noël A. Kinsella, Président

Le viol et la violence en République démocratique du Congo

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, la guerre qui afflige la République démocratique du Congo a été appelée la guerre contre les femmes. En huit ans de guerre civile, on a utilisé contre des dizaines de milliers de femmes le viol comme arme de guerre à une échelle que le monde n’avait encore jamais vue. Les femmes victimes de ces viols sont physiquement ravagées, émotivement terrorisées et financièrement appauvries. Cette guerre a fait plus de cinq millions de morts depuis 1998. C’est plus que tout autre conflit depuis la Seconde Guerre mondiale.

Ce mois-ci, cela fera un an que les Nations Unies ont demandé au Canada de diriger la mission de maintien de la paix. Quelle déception de voir notre gouvernement refuser cette occasion d’aide. Nous avons une fière histoire de maintien de la paix et nous avons besoin que le Canada fasse sentir sa présence au Congo. Le Canada est un chef de file mondial en matière de droits de la personne et nous devons nous montrer à la hauteur de notre réputation pour les femmes et les enfants au Congo.

Aujourd’hui, je veux raconter l’histoire d’une Congolaise que j’ai rencontrée et qui a changé ma vie. Elle s’appelle Bernadette. La première fois que la milice a pris d’assaut sa maison, les miliciens ont tué son mari et l’un de ses fils, puis ils ont violé et tué sa fille pendant qu’elle était forcée de regarder la scène. Ce jour-là, Bernadette a aussi été violée. Elle a crié au secours, mais personne n’a répondu à son appel.

La deuxième fois que l’armée congolaise a envahi sa maison, les soldats ont violé et tué sa deuxième fille pendant que Bernadette devait assister à la scène. Bernadette a encore été violée. Elle a crié à l’aide, mais personne n’est venu.

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La troisième fois, la milice a envahi sa maison. Heureusement, ses trois autres enfants étaient sortis. Bernadette a encore une fois été sauvagement violée. Cette fois, on lui a mutilé les organes génitaux. Les miliciens lui ont versé du kérosène dans le vagin et l’ont brûlée vive. Même si Bernadette a survécu, elle n’a pas appelé à l’aide cette fois. Elle savait que personne ne répondrait.

Honorables sénateurs, c’était la réalité de bien des femmes qui sont parmi nous aujourd’hui sur la Colline du Parlement. Et pour bien des congolaises, c’est encore la réalité.

Les Canadiens doivent entendre l’appel de Bernadette. Nous avons le devoir de défendre les droits humains, mais nous en avons aussi un autre. Il y a beaucoup d’intérêts miniers canadiens au Congo, dont nous profitons tous. Les téléphones cellulaires que nous utilisons viennent du Congo. Si des entreprises canadiennes exploitent ces ressources, il nous faut un programme pour veiller à ce qu’elles assument leur responsabilité sociale.

Honorables sénateurs, je vous demande de travailler avec moi pour aider les Congolaises comme Bernadette. Les femmes qui sont sur la Colline aujourd’hui sont des Canadiennes. Leurs familles souffrent au Congo. Honorables sénateurs, nous devons agir.

Des voix : Bravo!