Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 40e Législature,
Volume 147, Numéro 67

Le jeudi 18 novembre 2010
L’honorable Noël A. Kinsella, Président

Les travailleurs agricoles migrants

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet des droits des travailleurs migrants temporaires au Canada. En septembre dernier, j’ai visité un centre de soutien pour travailleurs agricoles à Surrey, en Colombie- Britannique. Ce centre aide les travailleurs migrants qui viennent travailler au Canada en vertu d’un visa de travail temporaire. Malheureusement, la majorité de ces travailleurs souffrent en silence, et c’est pourquoi je me sens obligée de me faire leur porte- parole aujourd’hui.

Pendant ma visite au centre, j’ai entendu de nombreux récits de mauvais traitements infligés par les employeurs. Un de ces récits, celui d’un Mexicain nommé Benigno qui travaille dans une entreprise agricole de Colombie-Britannique, m’a particulièrement touchée.

Benigno était chargé de vider jusqu’à 10 sacs de 25 kilos de pesticide en poudre dans un système d’irrigation pendant près de cinq heures par jour, sans aucune formation ni équipement de sécurité. Cette tâche était réservée aux superviseurs, qui portaient un appareil de protection respiratoire et qui avaient reçu la formation appropriée.

Cette exposition constante, prolongée et sans protection à des produits chimiques toxiques a eu de graves conséquences pour le système respiratoire de Benigno. Lorsque l’agent de liaison de l’employeur, qui servait d’interprète, l’a envoyé voir le médecin, Benigno a indiqué qu’il avait de la difficulté à respirer. Chose peu étonnante, l’incident a été classé comme une visite personnelle sans aucun lien avec son emploi. On lui a prescrit deux types d’inhalateurs, puis on l’a renvoyé chez lui.

Après avoir enduré ce travail dangereux pendant quelques mois de plus, Benigno est rentré au Mexique. Lorsqu’il s’est par la suite présenté devant le médecin chargé de déterminer s’il était apte à participer au Programme des travailleurs agricoles saisonniers, ce dernier lui a appris que cela lui serait dorénavant impossible, car ses poumons étaient trop détériorés par les pesticides pour lui permettre de fournir les efforts physiques que l’on exige des travailleurs agricoles.

Benigno n’avait pas le choix. Il devait continuer à travailler. À l’origine, il était venu au Canada pour assurer la subsistance de sa famille, et il voulait continuer de travailler au Canada. Benigno a continué à travailler en dépit de la douleur jusqu’à ce qu’il ne soit plus capable de marcher du tout.

Honorables sénateurs, des centaines de milliers de travailleurs comme Benigno arrivent chaque année au Canada munis d’un permis de travail temporaire. Ces travailleurs contribuent énormément à l’industrie agricole canadienne. Grâce à leur travail, nous pouvons manger des fruits et des légumes meilleurs et moins chers.

Honorables sénateurs, les travailleurs agricoles temporaires jouent un rôle important dans notre pays. Il faut qu’ils puissent se faire entendre.