1re Session, 41e Législature,
Volume 148, Numéro 174

Le jeudi 13 juin 2013
L’honorable Noël A. Kinsella, Président

La Fédération de soccer du Québec

L’interdiction du port du turban

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je désapprouve la décision qu’a prise la Fédération de soccer du Québec d’interdire aux joueurs sikhs de porter le turban. Je suis tout à fait de l’avis du chef libéral Justin Trudeau, qui a déclaré ceci :

Un turban ne devrait empêcher aucun enfant de jouer au soccer. L’ACS a raison de suspendre la FSQ.

Honorables sénateurs, le turban fait partie intégrante de la foi sikhe. C’est considéré comme un symbole de la foi. Tant les hommes que les femmes se couvrent la tête. Ce n’est pas un aspect facultatif du code vestimentaire des sikhs. Selon les conventions et le code de conduite des sikhs, les hommes sont obligés de porter le turban, qui représente la spiritualité.

Bien des sociétés considèrent qu’il est important que les femmes couvrent leur chevelure pour faire preuve de modestie et de respect. Dans la religion sikhe, les hommes autant que les femmes doivent se couvrir la tête pour faire preuve de modestie et témoigner du respect à Dieu. À bien des égards, le turban est un signe d’égalité entre les femmes et les hommes de la foi sikhe.

Honorables sénateurs, la liberté de religion est un droit fondamental en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. L’article 27 fait du maintien et de la valorisation du patrimoine multiculturel des Canadiens un droit constitutionnel.

Honorables sénateurs, je tiens à féliciter l’entraîneur Ihab Leheta et son équipe de Brossard, au Québec. L’entraîneur a déclaré ceci à la Gazette de Montréal :

« J’ai demandé [aux membres de l’équipe] de me dire ce qui était plus important [que le match]. […] Un joueur a répondu l’école et un autre, la famille. Puis, un troisième a dit : l’injustice. »

L’article de la Gazette se poursuit ainsi :

Même si aucun des 18 membres de l’équipe n’est sikh, Leheta a demandé aux joueurs, qui ont 14 ans et moins, de lui dire ce qu’ils feraient si un des leurs était exclu à cause d’un turban. […]

Avec l’appui enthousiaste de ses joueurs et de leurs parents, l’entraîneur s’est rendu au temps sikh de LaSalle le lendemain matin, et a emprunté 20 foulards orange que les garçons ont portés en guise de turbans lors de leur match important le jour même, à Brossard […]

« J’étais très fier d’eux, a dit Leheta. [Ils ont compris] qu’aujourd’hui, ce sont les sikhs [qui se voient interdire de jouer] et que, demain, ce sera quelqu’un d’autre. »

Honorables sénateurs, entretemps, Aneel Samra, un joueur sikh de 18 ans ne peut pas jouer au soccer à cause de la décision de la Fédération de soccer du Québec.

Il y a quarante ans, lorsque j’ai entrepris ma carrière d’avocate, je me suis battue aux côtés de beaucoup d’autres personnes pour garantir les droits des minorités religieuses au Canada. Le combat continue aujourd’hui, honorables sénateurs. Porter le turban n’est pas facultatif pour les sikhs. Cet accessoire leur est obligatoire pour exprimer leur foi et leur appartenance. Pour Aneel Samra et les autres hommes et garçons sikhs, le turban est indissociable de leur identité.

J’espère que les sénateurs se joindront à moi pour demander à la Fédération de soccer du Québec de renoncer à interdire le turban et de permettre à tous les Québécois de pratiquer ce sport vraiment universel.