1re Session, 42e Législature,
Volume 150, Numéro 133
Le jeudi 15 juin 2017
L’honorable George J. Furey, Président
Recours au Règlement
L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, j’invoque le Règlement. Je le fais avec beaucoup de réticence, mais je crois que le temps est venu de dire que nous devons tous nous exprimer avec respect à l’égard des autres personnes dans cette enceinte.
Deux musulmanes siègent parmi vous aujourd’hui. Nous avons l’impression qu’on ne nous considère pas comme modestes. Votre Honneur, j’invoque le Règlement en raison de ce qu’a dit le sénateur Enverga :
Considérons les pratiques qui sont importantes pour les musulmans. Tous les sénateurs savent que beaucoup de musulmanes portent un voile, souvent le hidjab. Généralement, nous estimons que le voile symbolise la modestie et la pudeur, car les femmes ne doivent pas montrer leurs cheveux aux hommes. Si, pour des motifs d’ordre religieux ou culturel, une femme ne veut pas montrer ses cheveux à un homme, comment pourrions-nous la contraindre à se trouver dans des locaux à caractère particulièrement privé et intime avec une personne qui, par tous les aspects physiques et biologiques, semble appartenir au sexe opposé?
Je vous pose la question, honorables sénateurs : est-il possible que, en adoptant le projet de loi, nous exercions une certaine discrimination contre nos amis musulmans et contre les membres d’autres groupes, étant donné leurs pratiques et leurs principes en matière de modestie?
Votre Honneur, je ne sais pas comment le dire autrement, mais, compte tenu de ce qui se passe autour de nous et compte tenu de toutes les statistiques sur les crimes, j’invite respectueusement les sénateurs à montrer de la considération aux deux musulmanes qui siègent avec eux. Le sénateur fait référence à une religion — et uniquement cette religion —, alors que nous savons pertinemment que des gens de différentes religions nous ont écrit pour dire qu’ils n’appuient pas le projet de loi. Je ne demande à personne ici d’appuyer ou de ne pas appuyer le projet de loi. Je tiens seulement à ce que les honorables sénateurs sachent que de tels propos nous blessent profondément.
Cela nous heurte. Ne nous faites pas cela. Au Sénat, nous avons une règle, Votre Honneur, au sujet du langage non parlementaire. Voici ce que dit l’article 6-13(1) du Règlement : « Les propos injurieux ou offensants sont non parlementaires et contraires au Règlement. »
Je vous dis en tout respect, chers collègues, que deux femmes siègent parmi nous. Ne nous accusez pas de manquer de modestie. Nous avons les mêmes difficultés à surmonter que tous ceux d’entre vous qui ont la foi. N’empirez pas les choses. J’estime qu’il est non parlementaire de dire que nous manquons de modestie.
L’honorable Tobias C. Enverga, Jr. : Votre Honneur, chers collègues, je n’avais pas l’intention de vexer qui que ce soit ou de dire quoi que ce soit pouvant être perçu comme négatif au sujet de l’islam ou des musulmanes ici.
J’ai essayé de communiquer mon souci de les protéger. J’ai dit que beaucoup de musulmanes se couvrent la tête en signe de modestie. Je n’ai jamais dit ou insinué que toutes les musulmanes portent le hidjab. J’estime que le droit à la modestie et à l’intimité de toutes les musulmanes, qu’elles choisissent ou non de se couvrir la tête, devrait être respecté et protégé. C’était mon intention.
Si j’ai blessé quelqu’un ici, cela n’a jamais été, de quelque façon que ce soit, intentionnel.
Son Honneur le Président : Je remercie la sénatrice Jaffer d’avoir soulevé ce rappel au Règlement au sujet des propos tenus dans les débats et j’apprécie beaucoup les excuses présentées par le sénateur Enverga. Je rappelle aux sénateurs la teneur de l’article 6-13(1) du Règlement et qu’il n’y a pas que les propos injurieux ou offensants qui sont non parlementaires et contraires au Règlement; les commentaires personnels le sont aussi. Je vous demande, honorables sénateurs, de bien vouloir vous reporter à cette disposition du Règlement en préparant vos interventions et de toujours avoir à l’esprit le décorum du Sénat et le respect qui doit être porté à toutes les personnes qui y siègent.