2e Session, 43e Législature
Volume 152, Numéro 30

Le lundi 15 mars 2021
L’honorable George J. Furey, Président

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Message des Communes—Motion de renonciation aux amendements du Sénat et d’adoption des amendements des Communes—Ajournement du débat

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-7 ainsi que du message que nous avons reçu de la Chambre des communes.

Sénateurs, en ces temps de pandémie, nous travaillons tous dans un contexte particulièrement difficile, et je pense notamment aux membres du personnel du Sénat, qui travaillent dans des conditions encore plus difficiles.

Le Comité des affaires juridiques a été mis sur pied le 18 novembre 2020, et le 19 novembre, j’ai reçu un appel du leader du Sénat, le sénateur Gold, m’informant que les leaders avaient convenu que le comité pourrait lancer une préétude concernant le projet de loi C-7 le 23 novembre, quelques jours plus tard. Le délai était très court.

Aujourd’hui, je tiens à souligner le soutien que Blair Armitage, greffier adjoint des Comités, et Shaila Anwar, greffière principale des Comités, ont apporté à notre comité. Ils ont réuni tout le personnel et toutes les ressources qu’ils pouvaient pour nous permettre de mener à bien notre travail, et je les en remercie.

Le greffier du comité, Mark Palmer, a fait un travail d’orfèvre en organisant en peu de temps l’audition de 81 témoins sur une période de cinq jours.

Par la suite, les 1 er, 2 et 3 février, nous avons reçu 66 témoins.

Je tiens à souligner le travail remarquable du greffier Mark Palmer, dont le dévouement et l’engagement ont été essentiels à la réalisation de nos travaux. J’aimerais également remercier les greffiers et le personnel administratif, cette équipe de membres dévoués qui ont travaillé en silence dans les coulisses pour faciliter notre travail. Nous n’aurions pu l’accomplir sans l’aide précieuse de Joëlle Nadeau, Evelyne Cote, Maritza Jean-Pierre, Lori Meldrum, Debbie Larocque, Brigitte Martineau et Elda Donnelly.

Je tiens également à remercier Heather Lank, bibliothécaire parlementaire, et son personnel qui nous ont apporté un soutien considérable.

Nous avions deux analystes extraordinaires, Julian Walker et Michaela Keenan-Pelletier, qui ont produit non pas un, mais deux rapports en plus de nous épauler dans l’étude du projet de loi C-7. Ils ont rédigé deux rapports reprenant tout ce que nous avons entendu au cours des séances et ils nous ont fourni une analyse de fond et des idées pour nous aider à faire avancer ce projet de loi critique et délicat.

De nombreuses autres personnes ont apporté leur aide, et je m’excuse sincèrement si j’ai oublié quelqu’un, et je leur exprime toute ma gratitude.

Honorables sénateurs, je tiens a remercier particulièrement les interprètes. L’étude du projet de loi a été très difficile pour nous. Toutefois, ce fut encore plus difficile pour les interprètes. De surcroît, comme vous le savez, honorables sénateurs, nous avons entendu de nombreux témoins qui éprouvaient des difficultés. Quand certains de ces témoins se sont présentés devant le comité, il y a eu des problèmes. Toutefois, les interprètes ont été extraordinaires, car ils refusaient de les laisser partir. Ils ont travaillé fort avec eux pour que les sénateurs puissent entendre toutes les personnes qui souhaitaient témoigner. J’ai vraiment appris une grande leçon : nos interprètes sont exceptionnels et ils traversent des moments très difficiles à cause de la COVID-19, mais ils continuent à travailler avec nous. Je les en remercie.

Je tiens aussi à remercier les membres du comité directeur du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, soit la sénatrice Batters et les sénateurs Campbell et Dalphond, qui ont travaillé sans relâche sur le projet de loi, qui ont assumé une charge de travail très lourde dans des circonstances difficiles en raison du confinement lié à la pandémie et qui devaient respecter un échéancier serré. Merci, honorables sénateurs.

Je remercie chaleureusement les membres du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles et tous les sénateurs d’avoir étudié avec diligence le projet de loi.

Je tiens aussi à remercier la marraine du projet de loi, la sénatrice Petitclerc, ainsi que son porte-parole, le sénateur Carignan.

(1940)

Honorables sénateurs, je vous remercie de tout le soutien que vous avez apporté au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles. Je crois que les questions dont nous sommes saisis sont des questions difficiles et que nous nous sommes tous efforcés de servir les Canadiens le mieux possible, car nous comprenons l’objet du projet de loi. Il traite de la souffrance et de la mort.

Dans la lettre qu’elle nous a envoyée et que vous avez tous reçue, Janet Hopkins nous pose la question suivante : « Que sont des “souffrances acceptables“? »

Les mots de Jason LeBlanc me sont immédiatement venus à l’esprit. M. LeBlanc est le soignant de sa conjointe de fait, qui a demandé l’aide médicale à mourir. Lors des audiences, il a dit ceci :

Il s’agit d’une décision […] qui n’est pas prise par votre médecin, votre soignant, votre famille ou votre gouvernement. Le concept de l’aide à mourir consiste à permettre aux Canadiens de mettre fin à des souffrances qu’ils jugent intolérables.

Honorables sénateurs, comme nous le savons tous, l’aide médicale à mourir est un sujet compliqué qui a des conséquences bien réelles sur la vie des Canadiens les plus vulnérables. Elle touche aux soins de santé, aux soins palliatifs, à la maladie mentale, au racisme systémique, à l’accès aux services sociaux et, surtout, au droit d’une personne de décider de sa vie et sa mort.

Comme Mme Hopkins nous l’a dit : « Ce n’est pas que nous voulons mourir, mais plutôt que la douleur a anéanti notre volonté de vivre. »

C’est en ayant à l’esprit cette douleur que notre comité à étudié le projet de loi C-7. Parmi nos témoins, nous avons entendu des Canadiens touchés par ce projet de loi, d’éminents professeurs d’université, des praticiens de la santé, des psychiatres, des experts juridiques et des représentants d’organismes non gouvernementaux. En février, comme je l’ai déjà mentionné, nous avons entendu 66 nouveaux témoignages et reçu des milliers de mémoires. Avec l’aide de nos analystes, le comité a produit deux rapports durant son étude.

Ainsi, sénateurs, nous avons réalisé qu’un aspect n’avait pas été pris en compte dans le projet de loi et que cela pourrait avoir des répercussions sur les Canadiens racialisés. Lors de son témoignage poignant, Sarah Jama a déclaré ce qui suit aux membres du comité : « Ces priorités sont déconnectées de la réalité du classisme, du racisme et du capacitisme dans notre pays. »

Mme Jama avait raison et nous l’avons constaté quand le gouvernement nous a soumis son analyse comparative entre les sexes plus. L’ACS+ aurait dû comprendre une analyse fondée sur la race, mais ce n’était malheureusement pas le cas. La raison est bien simple, comme l’a expliqué le ministre de la Justice, M. Lametti, il n’y avait pas suffisamment de données désagrégées.

Je dois admettre que je me suis demandé comment les législateurs et les parlementaires peuvent arriver à prendre des décisions éclairées et veiller à ce que des politiques adéquates soient mises en place s’ils ne disposent pas des données pertinentes. Comment pouvons-nous résoudre des problèmes et éviter qu’ils s’enveniment si nous n’avons pas l’information requise? J’ai donc proposé un amendement pour inclure la collecte de données fondées sur la race.

Honorables sénateurs, je tiens à remercier le ministre d’avoir appuyé mon amendement et de joindre sa voix à la nôtre pour demander une collecte et une analyse systématiques des données sur la race de toutes les personnes qui demandent et reçoivent l’aide médicale à mourir.

Bon nombre d’entre vous savent que j’hésitais grandement à élargir la portée de cet amendement. Nous en avons beaucoup discuté car je craignais que l’ajout d’un autre groupe entraîne le rejet de l’amendement. J’ai donc préféré m’en tenir à la collecte de données sur la race, sans savoir si le gouvernement accepterait cette idée. J’ai été absolument ravie que le gouvernement, et particulièrement le ministre Lametti, fasse un pas de plus, un pas important, et améliore l’amendement en y ajoutant la collecte de données sur l’identité autochtone et l’invalidité, et ce, pour toutes les personnes qui demandent et reçoivent l’aide médicale à mourir.

Je félicite le secrétaire parlementaire du ministre Lametti pour la déclaration qu’il a faite lorsqu’il a annoncé que le gouvernement allait élargir mon amendement pour inclure non seulement la race, mais aussi l’identité autochtone et l’invalidité. Il a dit ceci :

Évidemment, c’est une disposition particulièrement importante dans la mesure où nous proposons d’élargir l’admissibilité à l’aide médicale à mourir pour inclure les circonstances où la mort n’est pas raisonnablement prévisible, en réponse à la décision rendue dans l’affaire Truchon, ce qui crée un risque réel que des gens demandent l’aide médicale à mourir à cause de certains facteurs qui les rendent vulnérables plutôt qu’en raison de leur état de santé. Je sais gré au Sénat d’avoir proposé cette importante modification législative.

Cet amendement au projet de loi C-7 fait en sorte que des données sur la race, l’identité autochtone et l’invalidité sont recueillies auprès de toutes les personnes qui demandent et reçoivent l’aide médicale à mourir. Ainsi, il permet à tous les parlementaires de savoir exactement qui est touché par l’élargissement du régime d’aide médicale à mourir.

Honorables sénateurs, j’aimerais dire une chose. Lorsque j’ai proposé l’amendement, je ne croyais pas qu’il allait être adopté. L’appui extraordinaire que j’ai reçu de vous tous — tous autant que vous êtes — m’a vraiment honorée. Je sens que nous formons ensemble une entité qui veille réellement sur les plus vulnérables. Je vous salue et je vous remercie. Je vous suis très reconnaissante de votre appui. Merci beaucoup.

[Français]