1re Session, 41e Législature,
Volume 148, Numéro 149

Le mardi 26 mars 2013
L’honorable Pierre Claude Nolin, Président suppléant

La coopération internationale

L’Agence canadienne de développement international—L’aide à l’étranger

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Comme les honorables sénateurs le savent, le ministre Flaherty a annoncé jeudi dernier que l’Agence canadienne de développement international sera intégrée au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Cette décision constitue une occasion importante de faire une évaluation critique de la politique canadienne en matière de développement.

Au cours d’une entrevue donnée en décembre 2012, le ministre Fantino a déclaré que les investissements du Canada dans le développement international devraient promouvoir les valeurs canadiennes, l’entreprise canadienne, l’économie canadienne, les retombées pour le Canada.

Le professeur Roland Paris affirme que la mise en place de conditions favorables à une croissance durable axée sur le marché dans les sociétés en développement semble le meilleur remède contre la pauvreté.

Toutefois, les partenariats d’aide avec le secteur privé devraient viser à aider les pays qui ont des besoins criants, non à accroître les bénéfices du Canada. Ni la crédibilité du Canada à l’étranger, ni les milliards de pauvres sur la planète ne sont bien servis si la politique canadienne sur le développement vise d’abord à promouvoir les intérêts commerciaux du Canada.

Voici la question que j’ai à poser à madame le leader du gouvernement au Sénat : nos dépenses en matière de développement viseront-elles en priorité à réduire la pauvreté ou à promouvoir les intérêts commerciaux du Canada?

L’honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, nous avons rendu l’aide du Canada plus efficace et nous continuerons de le faire. Nous consacrons dans la loi les importants rôles et responsabilités du ministre à l’égard du développement international et de l’aide humanitaire. Cette réorganisation renforcera la coordination de l’aide internationale avec les valeurs et les objectifs plus larges du Canada et placera le développement sur un pied d’égalité avec le commerce et la diplomatie.

Comme me l’ont fait remarquer plusieurs fonctionnaires que j’ai rencontrés au cours du week-end, une grande partie de l’aide du Canada est actuellement acheminée vers des pays où le Canada injecte des sommes considérables dans le développement. Le budget de l’aide au développement sera maintenu. Le nouveau ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement conservera le mandat de la lutte contre la pauvreté et de l’aide humanitaire. Selon le Globe and Mail d’il y a deux jours, l’honorable Lloyd Axworthy aurait dit : « Je félicite le gouvernement d’avoir pris cette mesure. »

À l’avenir, honorables sénateurs, les choses se passeront dans les pays ciblés. Par le passé, nous avons donné accès à l’éducation à plus de 2 millions de personnes, vacciné plus de 9 millions de personnes contre la polio et nourri plus de 18 millions de personnes. Nous avons délié 100 p. 100 de notre aide alimentaire, et notre stratégie de sécurité alimentaire donne des résultats. En Éthiopie, par exemple, nous avons secouru environ 7,8 millions de personnes en leur donnant des vivres et de l’aide. Nous avons également injecté un montant appréciable dans le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

La sénatrice Jaffer : Le professeur Paris fait valoir dans ses observations que l’aide au développement nécessite des engagements à long terme à l’égard des projets et des pays choisis. Beaucoup de gouvernements du Canada, y compris le gouvernement actuel, ont trop souvent réinventé les priorités canadiennes en matière de développement à long terme. C’est là un problème politique urgent.

En 2009, par exemple, le gouvernement a annoncé qu’il concentrait son aide dans 20 pays. Cinq des six pays dont les budgets bilatéraux ont été réduits par le gouvernement sont parmi les 20 pays ciblés en 2009.

D’après certains reportages, les problèmes de sécurité et de reddition des comptes rendent certains pays moins attrayants pour le soutien direct. La politique du Canada sur le développement ne devrait pas être axée sur les pays attrayants ni promouvoir les priorités à la mode en matière d’orientation. Le développement ne se fait pas en l’espace d’un ou deux cycles électoraux. Il faut parfois des décennies.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle expliquer comment le gouvernement entend donner plus de stabilité et de cohérence à la politique d’aide du Canada?

La sénatrice LeBreton : Honorables sénateurs, les faits sont suffisamment éloquents. Le gouvernement a adopté une approche plus ciblée de l’aide et il a obtenu d’excellents résultats. Je souligne de nouveau, à propos de l’ACDI, que cette réorganisation va renforcer la coordination de l’aide internationale avec les valeurs et objectifs plus larges du Canada, et le développement sera placé sur un pied d’égalité avec le commerce et la diplomatie. Comme on l’a fait remarquer, nous nous efforçons également de développer un grand nombre des pays que nous aidons afin qu’ils soient en meilleure posture pour progresser.

Cette mesure va simplement assurer une meilleure coordination, par le ministère des Affaires étrangères, des efforts très importants que le Canada déploie sur le front de l’aide humanitaire.

La sénatrice Jaffer : Honorables sénateurs, j’ai une autre question à poser à madame le leader du gouvernement au Sénat. Le gouvernement du Canada est-il toujours déterminé à éradiquer la pauvreté, ou les intérêts commerciaux auront-ils la priorité?

La sénatrice LeBreton : Honorables sénateurs, comme je l’ai déjà dit, le gouvernement applique une approche très équilibrée. Il a un bilan remarquable, et j’en ai énuméré quelques éléments, pour ce qui est de l’aide à ces pays et de l’éradication de la pauvreté. Nos programmes de santé de la mère et de l’enfant sont incomparables. Nous avons consacré beaucoup d’efforts et d’argent à l’éradication de la polio. La lutte contre l’épidémie de sida est aussi un effort que le gouvernement continuera de promouvoir et de soutenir, ce qui englobe l’éradication de la pauvreté.