1re Session, 42e Législature,
Volume 150, Numéro 107
Le jeudi 30 mars 2017
L’honorable George J. Furey, Président
La sécurité publique
L’Agence des services frontaliers du Canada—La détention d’enfants réfugiés
L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, ma question s’adresse également au leader du gouvernement au Sénat. Monsieur le leader, je sais que ma question ne vous surprendra pas. Je pose régulièrement des questions sur ce sujet et je continuerai d’en poser, parce qu’elles portent sur la détention de jeunes enfants dans des prisons.
Il y a près d’un an, lorsque le ministre s’est présenté devant le Comité de la défense, il a affirmé qu’il étudierait la question. Il nous a dit — et j’ai pris sa parole comme un engagement de sa part — qu’il tenterait de trouver un moyen d’éviter de détenir des enfants.
Monsieur le leader, j’étais disposée à attendre et j’ai obtenu votre réponse. Celle-ci m’a mise tellement en colère que je vais devoir surveiller mes paroles.
Vous avez déposé une réponse, et je suis certaine qu’elle provient du cabinet du ministre. Dans la réponse, on peut lire ce qui suit :
[…] les politiques […] précisent clairement que les enfants ne sont détenus qu’en dernier recours et seulement après que les agents ont examiné ce qui est le mieux pour eux.
On examine ce qui est le mieux pour les enfants? Comme vous le savez, j’ai été avocate pendant de nombreuses années. Pendant 40 ans, j’ai plaidé des affaires relatives à la protection des enfants. Je me présentais devant le juge pour lui dire que le fait de séparer un enfant de ses parents n’était pas dans l’intérêt de l’enfant. J’ai ensuite travaillé en droit de la famille. Je disais au juge que le fait d’interdire à un enfant de voir son père ou sa mère n’était pas ce qui était le mieux pour lui.
Je n’ai jamais, de ma vie, pensé que la détention pourrait être dans l’intérêt d’un enfant.
Monsieur le leader, je ne vous demande pas de répondre, car je ne pense pas que vous diriez une telle chose. J’aimerais plutôt que vous demandiez au ministre d’expliquer en quoi exactement la prison pourrait être « ce qui est le mieux » pour un enfant. Nous sommes au Canada, ici.
La dernière fois que j’ai abordé ce sujet, j’ai mentionné que, en France, les enfants qui se trouvent dans ce genre de situation sont envoyés immédiatement à l’école, dans une ferme. Je me suis rendue moi-même dans cette ferme. Nous, au Canada, envoyons des enfants non accompagnés en prison et nous disons ensuite que c’est dans leur intérêt? Monsieur le leader, c’est inacceptable.
J’aimerais que vous vous engagiez à obtenir une réponse du ministre à savoir comment il peut dire qu’envoyer un enfant en prison est ce qu’il y a de mieux pour l’enfant.
L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie la sénatrice de sa question. Je serai heureux de prendre cet engagement.
Honorables sénateurs, je tiens en outre à ce que vous sachiez que, au cours des semaines qui viennent, je m’attends à ce que le ministre responsable soit présent à la période des questions au Sénat. Je n’ai nullement l’intention d’attendre jusque-là pour soulever la question, mais je sais très bien que ce sujet et d’autres questions touchant Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada suscitent de vives réactions. Il faut débattre de ces questions et bien les cerner.
La sénatrice Jaffer : Monsieur le leader, cette question ne relève pas du ministère de l’Immigration, elle est du ressort du ministre de la Sécurité publique, monsieur Goodale.
Monsieur le leader, la détention des enfants, même pendant une courte période, a des conséquences néfastes à long terme sur leur santé mentale. Selon l’Université de Toronto, 242 enfants sont placés en détention — 242 enfants sont gardés en détention au Canada. J’ai peine à y croire.
Je vous demande, encore une fois, de bien vouloir demander au ministre une justification pour cette pratique, car, il y a un an, il a comparu devant le Comité de la défense et a indiqué qu’il allait y mettre un terme.
Le sénateur Harder : Je serais heureux de le faire, mais d’abord, je soulignerai que l’étude de l’Université de Toronto à laquelle vous faites référence a montré un déclin considérable en 2016-2017. Je ne dis pas que les chiffres que vous avez cités ne sont pas préoccupants, mais je crois qu’il faut reconnaître qu’il y a eu une baisse importante des cas de détention et que, comme l’honorable sénatrice l’a souligné, les décisions concernant la détention sont prises en fonction de ce qui est le mieux pour les enfants, comme on l’a précisé dans les politiques.