La dernière prison que nous avons visitée était l’Établissement de Kent, le seul établissement fédéral à sécurité maximale pour hommes dans la région du Pacifique.
Lors de cette visite, j’étais encore accompagné par l’infatigable défenseur des droits, la sénatrice Kim Pate. Nous avons aussi été rejointes par la sénatrice Marilou McPhedran, ainsi que par Emily Grant, du bureau de la sénatrice Pate, et Madison Pate-Green, de mon bureau.
J’ai été très intéressée d’apprendre qu’avant de travailler avec les femmes en prison, la sénatrice Pate a travaillé avec des hommes dans les prisons du Canada.
À notre arrivée, nous avons été accueillis par les responsables de la prison, qui nous ont informés que sur les 240 hommes détenus, 88 (soit environ le tiers) sont Autochtones et 22 sont Noirs.
Nous avons également appris que, selon certains prisonniers, il y règne un climat raciste et toxique. Voilà un autre rappel du racisme et de la discrimination qui se manifestent chaque jour derrière les murs des prisons.
Après avoir brièvement discuté avec le personnel, nous avons appris que la première unité que nous avions l’intention de visiter était en confinement et qu’il serait impossible de rencontrer un détenu de cette unité en face à face.
Au lieu de cela, nous avons dû nous entretenir avec les détenus à travers la porte de leur cellule fermée à clé. J’ai peine à imaginer le manque d’humanité que ces hommes ont dû ressentir.
De plus, bien que le personnel nous ait affirmé le contraire, nous avons constaté que les lumières d’une cellule étaient défectueuses et ne pouvaient pas s’éteindre, et que les cellules et les douches ne semblaient pas être nettoyées régulièrement, malgré les protocoles de nettoyage prétendument accrus en raison de la COVID.
Dans ce secteur se trouvaient également des unités d’intervention structurée. Le Service correctionnel du Canada, qui administre toutes les prisons, considère ces unités comme une solution de rechange à I’isolement cellulaire. Cela dit, elles sont identiques aux anciennes cellules qui étaient utilisées pour isoler les prisonniers pendant des jours, des semaines, voire des mois; en outre, ceux qui y sont détenus n’ont toujours pas le droit de sortir de leur cellule pendant plus de dix heures et n’ont qu’un minimum de contacts humains.
Les gardiens nous ont dit qu’au moment de notre visite, 20 hommes se trouvaient dans des unités d’intervention structurée individuelles, tout en précisant que les détenus y étaient généralement plus nombreux, surtout pendant la pandémie.
Comme dans les autres prisons que nous avons visitées, les prisonniers ont réitéré n’avoir accès à pratiquement aucune activité ni occasion de formation. Les hommes étaient particulièrement contrariés par le fait qu’ils ne savaient jamais à quel moment ils auraient accès à la salle de sport ou à la bibliothèque de la prison.
Je me suis à nouveau demandé comment nous pouvions espérer que les prisonniers apprennent de leurs erreurs, s’améliorent et réintègrent la société si aucune possibilité ne leur était offerte.
Peu importe les crimes qu’ils ont pu commettre, au bout du compte, les prisonniers sont des êtres humains et, par-dessus tout, nos concitoyens : ils méritent d’être traités avec équité et dignité, dans le respect des droits de la personne, comme le prescrit clairement la Charte canadienne.