1. Tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives fédérales ou provinciales.

Dans mon article précédent, j’ai souligné comment les droits démocratiques des articles 3 à 5 de la Charte canadienne des droits et libertés ont évolué avec le temps. Alors que les articles 4 et 5 n’ont été invoqués qu’une seule fois devant les tribunaux, l’article 3 a fait l’objet de nombreuses causes et il a fait en sorte que des lois empêchant certains groupes de voter soient invalidées.

Maintenant que ces lois n’existent plus, les affaires qui mettent désormais en cause l’article 3 tournent autour d’une question différente : les lois et les pratiques qui rendent le vote difficile enfreignent-elles le droit de vote des Canadiens? Dans l’article d’aujourd’hui, je vais souligner les causes qui ont porté sur cette question et la façon dont on débat désormais de l’article 3.

Depuis au moins 1985, on se questionne à savoir si les lois sont acceptables aux termes de la Charte, soit lorsque la Colombie-Britannique a cessé de fournir des bulletins de vote d’électeurs absents pour ses élections.

À l’époque, le gouvernement affirmait que le fait de se débarrasser des bulletins de vote d’électeurs absents n’empêchait pas expressément certains groupes de voter et qu’il s’agissait simplement d’une mesure pour réduire les coûts et régler les problèmes liés au dépouillement de ces bulletins de vote.

La Cour suprême n’était pas d’accord. Dans sa décision, elle a indiqué que deux groupes en particulier étaient touchés par cette politique : les étudiants, les militaires et les citoyens qui ont des engagements à l’étranger. Par conséquent, le tribunal a conclu que la loi enfreignait leur droit de vote!

Après cette décision, des lois semblables, qui rendaient le vote difficile pour certains groupes, ont été contestées dans les années qui suivirent. Les lois qui interdisaient le vote par anticipation, le vote postal, l’inscription le jour du scrutin, l’utilisation de plusieurs langues dans les documents électoraux et les bulletins de vote pour les aveugles ont toutes été invalidées grâce à l’article 3!

En dépit de ces victoires, des obstacles injustifiés qui empêchent les gens d’exercer leur droit de vote existent encore aujourd’hui! En 2014, le gouvernement précédent a adopté la Loi sur l’intégrité des élections et il a empêché l’utilisation de la plupart des pièces d’identité sur lesquelles l’adresse de l’électeur n’est pas indiquée au moment de s’inscrire pour voter. À l’époque, je me suis vivement opposée à cette mesure.

Tout comme la cause de 1985, le gouvernement prétendait que la Loi sur l’intégrité des élections n’était pas conçue pour empêcher un groupe particulier de voter, mais bien pour empêcher la fraude électorale commise par des personnes qui prétendent habiter à un endroit où ils n’habitent pas.

De nombreuses personnes remettent en question cette logique, puisque des études ont déjà prouvé que la fraude électorale ne se produit presque jamais. De plus, il a été prouvé que quatre groupes ont été disproportionnellement désavantagés par cette loi : les jeunes, les aînés, les sans-abri et les Autochtones.

Chacun de ces groupes connaît des circonstances qui font en sorte qu’il est difficile pour eux d’obtenir le type de pièce d’identité exigé par la Loi sur l’intégrité des élections. Puisque ces personnes ne pouvaient plus utiliser la pièce d’identité qu’ils utilisent habituellement, la loi aurait empêché environ 250 000 personnes de voter lors des dernières élections!

Par conséquent, la Loi sur l’intégrité des élections est toujours contestée devant les tribunaux aujourd’hui.

Toutes les affaires précédentes faisaient appel à la même logique : dans chacune des causes, la Cour suprême a confirmé qu’il n’est pas suffisant pour un gouvernement de garantir simplement le droit de vote. Il doit aussi veiller à ce que le droit puisse être exercé!

On débat depuis des années de la question à savoir si les lois et les pratiques qui érigent des obstacles en vue de rendre le vote difficile enfreignent le droit de vote des Canadiens et on en débattra probablement dans de nombreuses affaires à venir!

J’espère que vous lirez mon prochain article dans lequel je soulignerai certaines des affaires les plus importantes mettant en cause l’article 3 de la Charte et l’incidence qu’elles ont eue sur le droit de vote au Canada.