À partir de cette semaine, cette série d’articles portera sur un droit différent garanti par la Charte canadienne des droits et libertés : le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, qui est énoncé à l’article 7, que voici :

  1. « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale. »

Contrairement aux autres droits dont j’ai traité, j’aborderai l’article 7 de manière indépendante, en raison de son importance et du fait que ce droit a donné lieu à un plus grand nombre de causes faisant jurisprudence que presque n’importe quel autre droit prévu par la Charte. Dans l’article d’aujourd’hui, je traiterai du premier terme du passage « le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne » : le droit à la vie.

Dans l’article 7, le mot vie décrit assez littéralement le droit de vivre. Dans sa plus simple forme, ce droit signifie qu’aucune loi ni aucun tribunal ne peuvent décider le moment où votre vie commence ou se termine.

À l’origine, ce droit a été inscrit dans la Charte pour éviter toute loi prévoyant la peine de mort. La peine capitale avait été abolie six ans avant la rédaction de la Charte, à savoir en 1976; toutefois, le premier ministre Trudeau voulait s’assurer que ce châtiment ne serait plus jamais rétabli.

Par conséquent, la peine de mort demeure illégale au Canada à ce jour! Toutefois, même si l’objectif à l’origine de ce droit a été atteint, des causes portant sur le droit à la vie ont vu le jour. En effet, en 1993, les tribunaux ont dû répondre à une nouvelle question dans le cadre de l’affaire Rodriguez c. Colombie-Britannique : le droit à la vie interdit-il l’aide au suicide?

La Cour suprême du Canada a répondu à cette question par la négative. Selon elle, « la vie humaine est sacrée ou inviolable », ce qui signifie qu’il n’y a aucune circonstance dans laquelle une personne pourrait avoir le droit de mettre un terme à sa vie.

Toutefois, l’affaire Rodriguez et des causes semblables ont donné naissance à un débat qui fait toujours rage aujourd’hui! Des Canadiens de partout au pays ont dénoncé cette décision, faisant valoir qu’elle aurait pour effet de les empêcher de décider de leur destinée, et ce, malgré leur libre arbitre! Plusieurs contestations en cour se sont ainsi succédé.

Il a fallu 22 ans pour que cette décision soit infirmée : une affaire célèbre connue sous le nom de Carter c. Canada. Cette affaire concernait une femme atteinte de sténose du canal rachidien lombaire et de la SLA qui éprouvait des douleurs horribles tous les jours et qui cherchait une manière de mettre un terme à ses souffrances — elle a déclaré que son seul recours serait de se donner la mort en cessant de s’alimenter si la justice lui opposait une fin de non-recevoir.

En prenant conscience à quel point il serait cruel d’obliger une personne à souffrir jusqu’à sa mort, la Cour suprême a annulé sa décision et accordé à tous les Canadiens le droit de mettre un terme à des souffrances intolérables.

Ce sujet est particulièrement d’actualité : cette année, le Parlement a légiféré sur cette question. En juin, le projet de loi C-14, qui établissait le cadre dans lequel les Canadiens pouvaient demander une aide médicale à mourir pour mettre un terme à des souffrances liées à une maladie terminale, a été adopté par le Parlement.

Ce projet de loi n’était pas parfait (comme je l’explique dans mon allocution, qui peut être lue ici), mais il s’agissait d’une reconnaissance importante des droits que la Charte et la Cour suprême accordent à tous les Canadiens, et cela prouve que même des droits aussi fondamentaux que le droit à la vie font toujours l’objet de débats!