1re Session, 43e Législature
Volume 151, Numéro 27

Le jeudi 25 juin 2020
L’honorable George J. Furey, Président

Le Sénat

Étude du rôle du gouvernement dans le combat contre le racisme en comité plénier

L’ordre du jour appelle :

Le Sénat en comité plénier afin d’étudier le rôle du gouvernement du Canada dans le combat contre le racisme envers les Noirs et les Autochtones, et pour mettre fin au racisme systémique.

La sénatrice McPhedran : Bienvenue à tous les ministres qui se sont joints à nous, et merci d’avoir pris le temps de venir livrer votre témoignage.

Je suis très honorée de pouvoir vous poser les questions de la sénatrice Jaffer avant d’en arriver à mes propres questions. Mon intervention fait suite à certaines des questions que la sénatrice Moncion vient de poser au nom de collègues.

Je vais lire le commentaire de la sénatrice Mobina Jaffer. Il s’adresse en premier lieu à vous, madame la ministre Chagger :

En tant que ministre de la Diversité et de l’Inclusion, je suis certaine que travailler sur des politiques visant à garantir l’inclusion est une priorité absolue pour vous. Au vu des récents événements et de la reconnaissance par le premier ministre Trudeau que le racisme systémique est un problème au Canada, nous avons tous encore plus de travail à faire. Ma question est la suivante : serez-vous la principale ministre chargée de veiller à ce que des politiques visant à éradiquer le racisme systémique soient mises en place et appliquées au sein de différents ministères? Par ailleurs, quel est votre plan d’action immédiat? Enfin, envisageriez-vous d’adopter une analyse fondée sur la race, qui s’ajouterait à l’analyse comparative entre les sexes plus dont nous disposons actuellement?

Monsieur le ministre Hussen, je m’adresserai ensuite à vous.

Mme Chagger : Je serai brève, car je suis consciente que le temps file.

C’est un outil de plus dans notre coffre à outils. Je ne veux nous priver d’aucun outil pour l’instant. Je m’efforce de collaborer avec tous les ministères, tous les organismes, tous les ministres et tous les Canadiens qui veulent contribuer pour déconstruire nos systèmes et examiner ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas, peut-être même ce qui est infesté de moisissures et dont nous devons nous départir. Pour moi, c’est comme un projet de rénovation. Grâce à la COVID-19, l’occasion est propice à reconstruire sur de meilleures fondations et de façon plus inclusive.

Je crois que les chemins n’auraient pas pu se croiser à un meilleur moment. Nous devons redéfinir ce qu’est la normalité, alors pourquoi ne pas créer une nouvelle normalité qui est plus inclusive, plus efficace pour le plus grand nombre de Canadiens possible, et pourquoi pas pour tous les Canadiens? Si cet outil nous aidera à y parvenir, oui.

À cette étape-ci, je demande des paramètres concrets, et j’essaie de savoir qui accède au gouvernement, qui postule, quelles sont les candidatures envisagées. De cette manière, je peux voir qui manque à l’appel et qui doit grossir les rangs.

Au fur et à mesure que nous développerons de nouveaux systèmes, je vais m’assurer qu’ils correspondent à la diversité canadienne et à l’expérience de la population canadienne. Chaque fois, je dis : « Quel bon programme, quelle bonne idée! Quelle en est l’origine? » Je vais mettre de la pression.

La sénatrice McPhedran : Je vous remercie, madame la ministre. J’ai une question complémentaire, qui vaudra aussi pour la réponse du ministre Hussen. Généralement, les résultats des analyses comparatives entre les sexes plus et des analyses en fonction de la race sont gardés secrets et considérés comme des documents confidentiels du Cabinet. Vous engagerez-vous à rendre ces renseignements plus facilement accessibles, ce qui aiderait le gouvernement à rendre des comptes sur les moyens qu’il prend pour contrer l’important problème du racisme systémique?

M. Hussen : Je vous remercie, sénatrice. Il s’agit d’une question fort importante, et c’est entre autres pour cette raison que nous avons décidé de créer le Secrétariat de lutte contre le racisme. Nous tenions à ce qu’une seule entité coordonne toutes les mesures prises dans l’appareil gouvernemental pour lutter contre le racisme et la discrimination systémiques et demande des comptes aux ministères.

Les événements des dernières semaines nous ont rappelé que nous devons tous améliorer nos façons de faire. Comme le disait la ministre Chagger, nous devons déconstruire les systèmes et voir là où on peut les améliorer. Doit-on changer la manière dont les données sont recueillies et dont les ministères rendent des comptes? Doit-on voir plus grand, ou mieux écouter les jeunes qui nous demandent de remédier aux torts du passé? C’est à voir.

Je suis d’accord avec la ministre Chagger. L’après-COVID doit être l’occasion pour tous de rebâtir, oui, mais en plus solide. Ne visons pas qu’un simple retour à la normale, parce que c’était justement une partie du problème. Réimaginons plutôt la société afin qu’elle soit plus inclusive, ce qui commence par prendre conscience de la dure réalité de trop nombreux Canadiens, qui ne s’en tirent pas aussi bien dans la vie que nous le souhaiterions, que ce soit parce qu’ils ont maille à partir avec la justice ou qu’ils n’ont pas accès à tous les services et programmes des différents gouvernements.

La sénatrice McPhedran : Que répondez-vous à la partie de ma question qui portait sur le secret, madame et messieurs les ministres?

Mme Chagger : J’ai des antécédents en science. Puisque tout le monde parle de données non regroupées, je dirais que cette discussion pose problème, car je me demande ce qu’on entend par là, au juste, et ce qu’on cherche exactement. Nous devons nous pencher de près sur les attentes que nous avons.

Par le passé, des données ont aussi été utilisées à mauvais escient. Je veux m’assurer qu’elles sont utilisées à bon escient et pour atteindre un objectif. Premièrement, je pense que cette discussion concernant les données non regroupées devrait porter notamment sur les modalités d’utilisation de ces données et sur la façon de les rendre accessibles pour les Canadiens.

Avec le recul, je dirais que le Groupe de travail sur l’immunité face à la COVID-19 qui a été mis sur pied travaille avec les provinces, les territoires et les différents ministères des divers ordres de gouvernement pour recueillir des données non regroupées afin que nous ayons un aperçu de la situation. Nous avons l’occasion d’établir certains paramètres pour encadrer la façon dont ces données sont utilisées et isolées. Je ne peux pas parler pour d’autres, mais, au gouvernement fédéral, l’un des problèmes est la façon d’isoler l’information. Si je demandais une liste de tout ce que le gouvernement a fait depuis son arrivée au pouvoir, en 2015, cette information serait très difficile à obtenir.

Je salue la sous-ministre déléguée principale Gina Wilson, qui travaille avec l’ensemble des ministères afin de rendre ces informations disponibles. Elle voit à ce que le Secrétariat de lutte contre le racisme soit une ressource et, lorsque ce n’est pas une ressource — vous savez, les femmes peuvent changer le monde —, nous le signalons, non pas à la table, mais durant la mise en œuvre du système. Si cela signifie qu’il faut faire avorter une discussion parce qu’on ne prend pas les moyens nécessaires que nous prévoyons pour arriver à de meilleurs résultats et à de meilleures interventions, c’est ce que nous ferons. Nous sommes résolus à accomplir ce travail ensemble.